Qui n’a jamais entendu dire, au cours de discussions entre amis : « La danse, moi, je ne comprends pas trop », « je me sens parfois mal à l’aise », « qu’est-ce qu’ils ont voulu dire ? » ? Sensibiliser les publics, jeunes d’autant plus, et rendre accessible l’art relèvent de la responsabilité des artistes et des professionnel.le.s de la culture. Néanmoins pourquoi faut-il entrer dans cette démarche ?
Photo : Emmanuelle Stäuble
A première vue, il peut être déroutant d’être spectateur.rice d’un spectacle de danse, comme il peut être troublant de visiter une exposition, regarder un film, ou encore assister à une pièce de théâtre. On peut rapidement avoir le sentiment de « ne pas avoir les codes » ou les références culturelles suffisantes pour recevoir et apprécier le spectacle pleinement. Pourtant, comme l’a dit André Malraux, à l’occasion de la création du Ministère de la Culture et de la Communication en 1959, il est indispensable de travailler à « rendre accessible au plus grand nombre les œuvres capitales de l’humanité et favoriser la création des œuvres de l’art et de l’esprit qui l’enrichissent ». Ces mots célèbres ont scellé depuis maintenant soixante ans l’objectif fondamental de démocratisation culturelle, c’est-à-dire la nécessité de mettre toutes les formes d’Art à la portée de tou.te.s. Il relèverait donc de la responsabilité des artistes et/ou des professionnel.le.s de la culture de travailler à l’accessibilité des oeuvres d’art pour tou.te.s. Alors, comment rendre la danse accessible, et pourquoi commencer la sensibilisation à cette forme d’art dès le plus jeune âge ?
D’abord, il est important de revenir un instant sur l’intérêt de sensibiliser les jeunes à la danse. Pour rechercher les fondements de ces réflexions sur l’accessibilité d’une oeuvre d’art, il faut aller regarder du côté des sociologues français, et de Pierre Bourdieu plus particulièrement. Dans des ouvrages comme L’Amour de l’art (1969), le chercheur met à jour la « violence symbolique » qui peut exister quand une personne ne se sent pas à l’aise dans une pratique culturelle car, pour des raisons socio-économiques notamment, cette pratique ne fait partie de ses habitudes. Certes, indépendamment de ces considérations sociologiques, on peut être tentés de croire que la danse apparaît comme l’un des arts les plus démocratiques possible car elle fait appel au corps, le plus grand dénominateur commun à toute l’Humanité ! Pas besoin de références culturelles particulières, pas besoin de connaître toute l’Histoire de la Danse ou d’être un danseur confirmé soi-même pour être spectateur. Et pourtant, il est évident que même tou.te.s pourvu.e.s d’un corps, tout le monde n’a pas pour pratique culturelle de danser ou d’aller voir des spectacles de danse, loin de là. A moins que l’on danse tou.te.s dès le plus jeune âge sans vraiment s’en rendre compte, par le simple fait de se mettre en mouvement au quotidien, mais cela est un autre sujet !
Au même titre que les autres arts, il s’agit de travailler pour rendre la danse plus inclusive et ouverte à toutes et tous. Or, l’égalité des chances pour accéder à la danse commence dès le plus jeune âge, et souvent dans le cadre de l’école. Les chorégraphes et les danseur.se.s ont ainsi tous un rôle à jouer pour sensibiliser les élèves à leur art, en partenariat avec les enseignants et les professeurs. Soixante ans après les mots d’André Malraux, l’objectif de démocratisation culturelle fait toujours bel et bien partie des objectifs actuels du Ministère de la Culture et de la Communication, mais il s’est précisé et décliné en un plan « d’éducation artistique et culturelle » (EAC) pour tou.te.s. L’origine de cette expression, les textes de référence et les modalités de mise en œuvre sont résumés dans cet article en ligne. On peut notamment y lire que « l’éducation artistique et culturelle est indispensable à la démocratisation culturelle et à l’égalité des chances. Le parcours d’éducation artistique et culturelle accompli par chaque élève se construit de l’école primaire au lycée, dans la complémentarité des temps scolaire et périscolaire d’une part, des enseignements et des actions éducatives d’autre part ». Les trois objectifs phares de l’éducation artistique et culturelle ys sont également déclinés : « permettre à tous les élèves de se constituer une culture personnelle riche et cohérente tout au long de leur parcours scolaire », « développer et renforcer leur pratique artistique », et « permettre la rencontre des artistes et des œuvres, la fréquentation de lieux culturels ». Un charte de l’éducation artistique et culturelle a en outre été rédigée en septembre 2018 pour compléter le cadre de référence de l’EAC, posé en 2015.
Ainsi, pour rendre accessible la danse à un public jeune, un des outils indispensables est le « parcours d’éducation artistique et culturelle » qui permet aux chorégraphes de rendre accessible la danse sur temps scolaire, en étroite collaboration avec les équipes éducatives et les partenaires culturels. Cela permet de commencer la sensibilisation à la danse dès le plus jeune âge et dans le respect de l’égalité des chances dans la mesure où ces parcours sont menés sur temps scolaire. Pour avoir quelques notions sur les étapes clés à connaître avant de se lancer dans un projet d’éducation artistique et culturelle dans la danse, il est possible de consulter cet article.