Nous continuons notre tour de table sur la créativité ! Aujourd’hui, une interview de Vincent Barat, co-fondateur du cabinet de conseil en stratégie Akoya, cabinet dédié aux ressources humaines.
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En tant qu’expert RH, comment définiriez-vous la créativité ?
Chez Akoya, notre job est de caractériser les besoins d’une entreprise en ressources humaines et de convertir la stratégie d’une entreprise en stratégie « people ». Nous définissons pour cela deux types de compétences, quantitatives et qualitatives : la créativité fait partie de cette dernière catégorie. Pour moi, faire preuve de créativité c’est être capable d’apporter des réponses nouvelles à des problèmes parfois anciens.
La créativité est-elle innée ou se travaille-t-elle ?
Je suis convaincu que la créativité se travaille : la créativité se développe ; on peut être naturellement plus enclin à la créativité, mais cela peut être inutile si on ne le développe pas. Certes, il existe des qualités auxquelles on fait appel pour être créatif : la curiosité par exemple. En effet, la créativité se nourrit en amont : il faut s’inspirer de ce qui existe déjà, quelque soit le domaine, en le revisitant. De plus, il ne faut pas avoir peur d’exprimer ses idées, d’oser, de prendre des risques. La créativité n’est pas l’intuition. Au contraire de l’intuition, la créativité se travaille car elle est comme un muscle : il faut s’exercer, un peu comme on ferait des pompes, en se forçant à réfléchir et en s’accordant notamment des moments particuliers pour cela. La plasticité du cerveau permet à ce dernier de continuer d’ailleurs à réfléchir, même une fois ce moment passé.
Pourquoi la créativité fait-elle partie des compétences les plus recherchées aujourd’hui dans l’entreprise ?
Aujourd’hui, c’est une évidence vu les évolutions technologiques et les résultats des expériences réalisées par les algorithmes, que les analyses sont de plus en plus fiables, que bientôt les machines elles mêmes seront capables de réaliser des tâches techniques comme les diagnostics médicaux… Cependant, il y a justement pour moi deux qualités qui distingueront toujours l’homme de la machine : l’empathie et la créativité.
C’est pourquoi, afin de sauvegarder ces compétences irremplaçables, il est fondamental de valoriser et de travailler sa créativité.
Quels freins usuels à la créativité en entreprise rencontrez-vous chez vos clients ? Quels conseils leur apportez-vous pour les dépasser ?
On remarque que chez nos clients le frein le plus usuel à la créativité est l’autocensure. Pour lutter contre cette autocensure, nous essayons de mettre en valeur le “droit à l’erreur”, qui consiste à se laisser la possibilité d’expérimenter, en acceptant que tout ne marche pas du premier coup. Oui, on a le droit de tester et de se tromper. Nous soulignons également l’importance de créer au sein des entreprises des circonstances favorables au développement de la créativité : favoriser un climat de confiance, de bienveillance, pour les équipes en aménageant des espaces d’écoute, d’expression libre et de réflexion.
Y a-t-il des secteurs ou des organisations plus adaptés à l’émergence de la créativité ?
Non, je ne pense pas qu’il y ait de secteurs plus favorables à la créativité que d’autres. Nous en avons fait nous-mêmes l’expérience en coachant récemment une équipe d’ingénieurs venant d’un grand groupe d’aéronautique. Cette équipe qui s’est révélée être extrêmement créative, enthousiaste et à l’aise, alors même qu’on aurait pu penser au départ que le secteur dans lequel ils travaillaient pouvait être un facteur de manque de créativité.
Vous avez suivi la formation créativité proposée par La Fabrique de la Danse, pouvez-vous témoigner du rôle du mouvement et de la pratique artistique sur vous et vos équipes ?
Ce qui m’a marqué c’est de voir que le mouvement de la danse peut devenir un automatisme. En effet, si au début le cerveau est focalisé sur l’ordre des gestes et le respect de leur bon enchaînement, et qu’il dépense pour cela beaucoup d’énergie et de concentration, qui n’est pas sans rappeler celui des arts martiaux, vient ensuite un déclic où le corps prend le dessus sur le cerveau et devient le pilote ! Cela procure alors un grand sentiment de liberté pour le cerveau…