Faites connaissance avec Joana Schweizer, de la promotion 2017 de l’incubateur de chorégraphes.
Quel est ton univers chorégraphique ?
Tout d’abord il faut préciser que je viens de la musique et de la danse et que j’ai toujours mené ces deux arts en parallèle. Je passe donc beaucoup de temps à chercher comment les relier : j’accompagne le corps avec la voix, je cherche son rythme, son phrasé.. Je cherche à reproduire le phrasé d’une pièce de Rameau avec le mouvement, ou encore à créer un pont sonore et physique entre deux univers différents, comme par exemple ceux du jazz bebop et de la musique contemporaine.
Je développe également un travail autour de l’espace, et ai créé de nombreuses pièces dont les points de départ étaient des scénographies imaginées au préalable. J’ai pu danser en duo dans une armoire accompagnée d’un quatuor à cordes, ou encore en solo accrochée par une corde à un piano à queue.
J’aime aussi investir l’architecture d’un lieu et ai eu la chance de faire de nombreuses performances en extérieur, dans des musées ou par exemple à l’abbaye de Royaumont.
Peux-tu nous parler de ta création en cours ?
Ma prochaine création en cours est un solo avec un piano à queue suspendu. Je suis danseuse, pianiste et chanteuse : un mélange imprégné de culture franco-portugaise, un exemple de métissage d’aujourd’hui. Ce solo est né d’une nécessité de décrire, d’expliquer de l’intérieur une démarche artistique personnelle : la volonté de lier les arts, de construire des passerelles entre la danse, la musique, le chant, la scénographie. Gala Ognibene, amie, scénographe et photographe m’accompagne dans cette écriture. Nous avons, à travers nos origines (portugaises pour moi et italiennes pour elle), à travers nos parcours et démarches artistiques hétéroclites, identifié de nombreuses similitudes, et un socle commun solide sur lequel nous puisons toute une richesse de sens.
Nous mettons en scène une personne aux origines multiples à qui l’on a toujours proposé de rentrer dans une case. La case représente notre société actuelle en induisant un intérieur, un extérieur avec au milieu une frontière. Nous trouvons ces cases dans la musique, la danse, le chant au travers du corps, du piano. Nous nous confrontons quotidiennement aux difficultés de la case : trop étroite, trop grande, pas de la bonne couleur, pas de la bonne matière. Ce mal-être est inhérent à tous. Ce solo traite de nos chemins internes, ce cheminement qui est au fond essentiel et permet de s’enrichir : c’est le chemin qui compte et non sa finalité. Cette personne parcourt et cherche sa place à travers un tumultueux mais optimiste voyage.
Nous créons un spectacle tout public d’une cinquantaine de minutes, qui éviterait toute ségrégation entre les différents arts que je pratique, en évitant un phénomène de « tour de Babel » où chacun, dans son propre domaine, pose et traite ses minuscules problèmes sans trop se soucier de la signification ou des conséquences que ceux-ci peuvent avoir dans d’autres domaines.
Enfin, ce solo s’inscrit aujourd’hui au début de ma carrière dans un souci d’approfondissement de soi, et dans le désir de développer mon propre langage scénique.
Pourquoi avoir postulé à l’incubateur de La Fabrique de la Danse ? Qu’attends-tu de ce programme d’accompagnement ?
Si j’ai postulé à l’incubateur de La Fabrique de la Danse c’est que j’avais besoin d’un réel soutien afin de mener à bien mon projet : créer ce solo qui me tient très à coeur et créer propre compagnie. Je me suis rendue compte que je n’avais pas les armes administratives pour mener ce projet de la bonne façon et l’équipe de la Fabrique pouvait tout à fait m’aider. J’avais déjà pu croiser lors de mes études au CNSMDP certains intervenants comme Christine Bastin ou Emmanuelle Staüble, ce qui m’a encouragé à postuler. De plus je suis assez admirative du courage de cette équipe qui a ce magnifique projet de réhabilitation d’un lieu en plein coeur de Paris dédié uniquement à… la danse ! Alors pourquoi refuser de se laisser embarquer dans cette vague d’enthousiasme !
En savoir plus :
– La promotion 2017 de l’incubateur